Lors du premier confinement, pour assurer les cours à distance, les enseignants ont utilisé de nouveaux outils comme les visioconférences. S’ils ont permis de pallier la fermeture des établissements, ils ne constituent pas la solution miracle. Certains enseignants au lycée, les seuls encore concernés actuellement par les cours à distance, ont parfois renoncé à les utiliser.
Fermés du jour au lendemain quelques jours avant le premier confinement, les écoles, collèges et lycées ont dû se réorganiser rapidement afin d’assurer la continuité pédagogique. La majorité d’entre eux s’est appuyée sur les outils à distance. Dans les écoles élémentaires, voire en maternelles, les enseignants ont principalement utilisé l’envoi de mails, adressés aux parents, contenant des fichiers avec des cours ou des devoirs. Dans les collèges et lycées, en revanche, des cours par visioconférence ont été lancés. Les équipes se sont appuyées sur les plateformes déjà développées de longue date, comme Pronote, et qui permettent aux enseignants de poster les cours, les documents qui seront travaillés en classe, d’indiquer les notes et d’assurer la liaison entre les enseignants, leurs élèves et leurs parents.
En parallèle, via ces outils, de nombreux établissements ont mis en place des cours par visioconférences. Grâce à ces logiciels, les élèves peuvent retrouver les horaires et les liens de connexion pour les suivre. Ils peuvent également écrire leurs questions, les poser oralement en utilisant leur micro ou encore répondre à des sondages. De leur côté, les enseignants peuvent montrer des schémas et interagir avec leur auditoire. En mars dernier, la mise en place de ces dispositifs a mobilisé les équipes administratives comme le corps professoral : les proviseurs, intendants et animateurs ont travaillé en lien avec les services du rectorat pour définir la nouvelle organisation. Des tâches administratives qui se sont ajoutées à la charge de travail habituelle.
Une fracture numérique encore importante
Par ailleurs, si l’utilisation des visioconférences a pu pallier l’arrêt des cours en présentiel, elle possède de nombreuses limites. D’abord, tous les élèves ne possèdent pas d’ordinateur, de smartphone, et encore moins de connexion internet. Les services de l’Éducation nationale estiment qu’environ 5% des élèves ont ainsi totalement décroché pendant la première période de confinement. Certains ne maîtrisent pas ou sont réticents à utiliser les nouvelles technologies. Ils peuvent, par exemple, hésiter encore davantage qu’en classe à prendre la parole. Ensuite, la fracture numérique ne concerne pas seulement les élèves. Les enseignants ne sont pas tous familiarisés avec les outils et internet, d’autant plus lorsqu’il faut mettre en place des cours à distance. Certains ont écarté cette possibilité. « Sur une petite dizaine d’enseignants, la moitié a mis en place des cours en ligne et tous ne l’ont pas fait de façon systématique », témoigne Sofia, dont les deux enfants sont scolarisés dans un collège de l’est parisien.
Des cours en alternance
Lors du second confinement, les visioconférences n’ont concerné que les lycées qui ont été contraints, par le ministère de l’Éducation nationale, à réduire de moitié les effectifs des cours en présentiel. La mise en place de cette disposition a été variable car le ministère a laissé la liberté aux établissements de s’organiser. Certains ont choisi de faire alterner deux groupes : un premier le matin et le second l’après-midi et d’inverser les groupes d’une semaine sur l’autre. D’autres ont privilégié une alternance quotidienne.
Outre les difficultés techniques (problèmes de connexion, réseaux saturés, « bugs » multiples…), l’enseignant doit jongler entre les deux groupes et s’adresser aux deux en permanence. « Nous perdons parfois beaucoup de temps pour mettre en place la classe virtuelle en parallèle à celle qui a lieu en présentiel. Tous les élèves ne se connectent pas. Certains sont parfois découragés par les problèmes techniques. D’autres pensent que les cours à distance sont facultatifs… Ensuite, il faut gérer deux groupes. Il n’est pas toujours évident de savoir si tous les élèves suivent bien le cours », témoignage Yannick, professeur de français dans un lycée parisien.
Des difficultés qui sont encore renforcées dans certaines matières comme les cours de langue : difficile de faire prendre la parole aux élèves derrière leur ordinateur… Certains enseignants ont ainsi renoncé à utiliser les visioconférences. « Il vaut mieux renforcer le travail avec les élèves en petit groupe lorsqu’ils sont en présentiel. Il faut en profiter pour avancer avec eux et leur donner des exercices et des travaux préparatoires pour la maison. Cela permet d’avancer plus vite sur le programme et cela réduit l’impact des allègements d’horaire plutôt que de perdre du temps en début de cours avec des connexions qui ne fonctionnent pas tout le temps », témoigne Aurélie, enseignante en histoire à Paris. Un point de vue largement partagé. Dans les bilans envoyés aux parents d'élèves à la veille des vacances scolaires de Noël, via la messagerie de Pronote, des enseignants se félicitent de la nouvelle organisation. La teneur de ces messages est en effet généralement positive et met l'accent sur l'ambiance de travail et l'efficacité de l'enseignement en demi-groupe. « Il n’est pas toujours facile de travailler avec des classes de 35 élèves voire davantage en classe de seconde. Avec des demi-groupes, l’ambiance de travail est beaucoup plus studieuse et décontractée, il n’est plus nécessaire de reprendre les élèves et de faire de la discipline. Des élèves qui n’avaient jamais pris la parole avant le second confinement participent en classe. Même si la charge d’horaires est moins importante, le travail mené est plus efficace et de meilleure qualité. Cela devrait se ressentir à la reprise, une fois les élèves en classe entière », rapporte un parent d'élève d'une classe de seconde dans un lycée de l'est parisien.
Malgré ces difficultés et les réticences parfois rencontrées, la crise sanitaire devrait permettre aux établissements et en particulier les lycées et les collèges d’accélérer leur transition numérique. Un changement indispensable pour préparer l’avenir des élèves.
Des ordinateurs pour presque tous les lycéens…
Pour éviter le décrochage scolaire, certaines régions – comme l’Ile-de-France - ont donné, à la rentrée de septembre, un ordinateur portable ou tablette aux lycéens de seconde afin qu’ils puissent travailler à distance pendant toute leur scolarité, pour les utiliser en cours ou à la maison, et pouvoir faire des recherches dans les deux situations... Une façon de répondre aux inégalités sociales mises en lumière lors du premier confinement, mais aussi de développer davantage l’usage du numérique au lycée. Notons une différence entre les régions, toutes n’ayant pas pu offrir un tel service.
Le CNED en première ligne
Parmi les plateformes proposées par les enseignants à leurs élèves de collège et de lycée figure celle du CNED (Centre National d’Étude à Distance). Ce dernier propose pour tous les niveaux (écoles primaires, collèges et lycées) des documents de cours en ligne mais aussi un nouveau service de classe « virtuelle » intitulé « Ma classe à la maison ». Ce service a rencontré un réel succès pendant le premier confinement. La plateforme ayant permis d’organiser 11,5 millions de cours virtuels entre mars et juillet. Depuis la rentrée, ce service a été aussi utilisé par les établissements qui ont dû fermer des classes en raison d’élèves testés positifs à la Covid-19. Depuis le deuxième confinement, il sert également aux lycéens. Depuis la rentrée, le service s’est enrichi de nouvelles fonctionnalités. Elles concernent par exemple la sécurité. Les enseignants peuvent désormais identifier leurs élèves avant de les faire rentrer dans la classe virtuelle et éviter ainsi les « intrusions » pendant les cours.
Pour aller plus loin
www.bfm.fr/parlons-public/vos-histoires/la-verite-sur-les-enseignants