Les collectivités font la chasse aux pesticides pour les espaces verts

Depuis le 1er janvier 2017, en vertu de l’application de la Loi Labbé, les collectivités ne peuvent plus utiliser de pesticides dans l’entretien des espaces verts, promenades, forêts et voiries de leur territoire. Cette loi de 2014, qui encadre l’utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national, connaît d’autres évolutions depuis le 1er juillet 2022. Elle s’applique désormais aux propriétés privées, aux lieux fréquentés par le public et aux lieux à usage collectif, comme les cimetières. Comment les agents des espaces verts s’adaptent-ils à ces nouvelles règles ? Quelles alternatives ont été expérimentées et mises en place par les collectivités ? Comment relever le défi du “zéro phyto” ?

Loi Labbé : une mise en place progressive

Votée en 2014, la Loi Labbé a pour objectif d’encadrer et d’interdire l’utilisation de produits phytosanitaires dans les espaces publics, mais aussi la vente de produits chimiques. Il s’agit à la fois de protéger la santé des habitants et de protéger la biodiversité. Cette loi a été mise en place progressivement, par grandes étapes, afin que les particuliers et les collectivités puissent s’adapter et mettre en place des solutions de remplacement. En effet, les communes sont les premières concernées par cette interdiction puisqu’elles ont en charge l’entretien des voiries, des espaces verts publics (parcs, squares…) et d’autres espaces collectifs comme les cimetières, zones désormais concernées par l’interdiction.

En 2015, la Loi sur la transition énergétique pour la croissance verte renforce la mise en place de la loi Labbé, avec une première interdiction en janvier 2017 de l’usage des pesticides pour les collectivités territoriales et les établissements publics. Dans le même temps, la vente libre des produits phytosanitaires n’est plus autorisée en magasin. En 2019, c’est l’utilisation des pesticides qui est interdite aux particuliers. Depuis juillet 2022, l’interdiction s’étend aux lieux de vie, privés comme publics, qu’ils s’agissent des espaces verts des hôtels, des entreprises ou des établissements de santé. Sont concernés également les terrains sportifs (comme les terrains de football). Autre espace concerné par l’interdiction des pesticides : les cimetières, généralement entretenus par les agents communaux. Toutefois, de nombreuses communes ont anticipé l’extension de la loi et promu des alternatives dans ces espaces particulièrement importants pour les citoyens et la vie communale.

Des enjeux sanitaires et environnementaux

Au travers de cette loi, c’est la nécessité de réduire les pesticides au regard de leur impact sur la santé humaine et sur la biodiversité ainsi que sur l’eau et les écosystèmes, qui est mise en avant. Les enjeux sanitaires et environnementaux sont de taille : il s’agit de protéger les populations de la toxicité de ces produits (en premier lieu les jardiniers qui manipulent les produits, en second lieu toute la population et particulièrement les enfants) et d’éviter qu’ils se répandent, dans la nature et dans l’eau qu’ils contaminent par infiltration et par ruissellement. Les désherbants utilisés sur des surfaces imperméables (comme les trottoirs, les cours bitumées…) se retrouvent en effet rapidement dans les eaux superficielles ou souterraines et entraînent une pollution des eaux. 

Le défi “Zéro phyto” : comment les collectivités s’adaptent 

Le passage au “zéro phyto” est certes un défi, mais c’est aussi une opportunité (autant qu’une obligation légale) pour les collectivités de proposer une ville plus verte, à la biodiversité plus riche, source de bien-être pour tous, à l’heure où le gouvernement souhaite accélérer la transition écologique du pays.

Le ministère de la Transition écologique a publié un guide pour accompagner les collectivités dans la mise en place de leur politique zéro pesticides. Parmi les alternatives, les communes peuvent mettre en place des principes de gestion écologique de leurs espaces verts, acquérir des outils permettant de se passer des pesticides (balayeuse mécanique, binettes, grattoir, brûleur thermique…). Cela peut également passer par la mise en place d’un plan de gestion différencié et d’un plan de désherbage alternatif sur la commune. C’est ce que fait la commune seine-et-marnaise de Fontainebleau (15 000 habitants) qui a instauré le zéro pesticide depuis 2011. À chaque commune sa façon originale de préserver la biodiversité tout en respectant la loi. À l’Isle d’Espagnac, en Charentes, on utilise des coccinelles pour réguler la présence de pucerons. Les agents communaux utilisent du purin artisanal d’ortie pour renforcer les arbres et ont planté des jachères de prairies fleuries pour limiter le désherbage.

Former ses agents et mettre en valeur les démarches

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De nombreuses chartes locales existent pour les communes et leur permettent de bénéficier d’appui technique dans leur démarche de transition écologique. Les collectivités peuvent demander à s’inscrire dans des démarches comme le label “Terre saine, commune sans pesticides” (plus de 300 communes portent ce label depuis 2016) et la démarche “Territoire à énergie positive pour la croissance verte” (400 collectivités candidates à ce jour) qui mettent en avant des territoires “d’excellence” en matière de transition écologique et énergétique. Parmi les domaines d’action prioritaires : la préservation de la biodiversité, dont la suppression des pesticides dans l’espace public. 

S’investir dans ces différentes démarches permet aux collectivités de décrocher des financements pour réaliser leurs projets, de les valoriser mais également de former leurs agents à de nouvelles pratiques, en faisant appel notamment au Centre national de  la fonction publique territoriale (CNFPT). La formation du personnel est en effet un paramètre important de cette évolution pour les collectivités.

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