Pompier, professeur, infirmière, collaborateur juridique ou agent de propreté, cinq fonctionnaires nous parlent de leur métier, mais aussi de la façon dont ils ont vécu la crise sanitaire. Cinq témoignages éclairants desquels émanent fierté, engagement et lucidité.
Camille Dos Santos, 26 ans, infirmière en psychiatrie, Paris
"Ce sont nos compétences qu'il faut reconnaître"
"J'ai choisi d'intégrer l'hôpital public car il offre une variété de postes et la possibilité de se former régulièrement. Cela permet ainsi d'évoluer plus facilement. Le fait de pouvoir être titularisée au bout d'un an de stage, ainsi que l'encadrement du temps de travail, m'ont également attirée. J'ai adhéré à cette idée de l'égalité des soins défendue par l'hôpital public. Dans ma pratique quotidienne d'infirmière, j’ai vite perçu le manque de moyens humains et matériels, particulièrement en psychiatrie. Nous nous battons pour que nos conditions de travail soient améliorées mais la crise sanitaire n'a fait qu'aggraver la situation. Au début de la pandémie, nous n'avions pas de masque, ni de gel hydroalcoolique, que ce soit pour nous ou pour nos patients. Nous avons dû redoubler de vigilance car les gestes barrières et l'absence de visites ou de sorties ne sont pas toujours bien compris par les malades. De plus, nous n'avons pas de locaux qui se prêtent au respect de la distanciation physique. J'ai, bien sûr, été sensible aux applaudissements de la population mais cela n'a pas changé mon quotidien. Aujourd'hui, la prime octroyée par le gouvernement, c'est bien sur le plan salarial. Mais, sur le long terme, ce sont nos compétences qu'il faut reconnaître."
Sylvie Mbem, 51 ans, collaboratrice juridique, Strasbourg
"La crise sanitaire n'a fait que renforcer mon engagement pour les plus démunis"
"Cela fait presque 20 ans que j'ai intégré la fonction publique territoriale et je me suis vraiment épanouie dans l'action sociale lorsque j’ai commencé. Depuis quatre ans, je travaille sur des dossiers de contentieux à la direction des affaires juridiques du Conseil départemental et je n'oublie jamais que derrière des numéros, il y a des êtres humains. La crise sanitaire n'a fait que renforcer mon engagement pour les plus démunis. Elle a aussi permis de souligner le rôle des départements auprès de l'Etat. Mais j'avoue que ma charge de travail a été démultipliée durant cette période car je devais suivre toute l'actualité juridique, en informer la direction générale et les services tout en continuant à servir les prestations sociales aux bénéficiaires. Tout cela en télétravail et en visioconférence avec les collègues. J'ai également fait du bénévolat en faveur des personnes fragiles grâce au dispositif Covid 19-Réserve civique. Aujourd'hui, je suis contente de travailler une fois par semaine en présentiel pour retrouver un peu de collectif."
Roland Dubourdieu, 48 ans, professeur agrégé de physique, Aix-en-Provence
"J'ai toujours autant de plaisir à faire cours devant mes élèves"
"Depuis 20 ans que j'exerce mon métier d'enseignant, j'ai toujours autant de plaisir à faire cours devant les élèves. Je dois reconnaître aussi que j'ai eu la chance d'évoluer dans des établissements situés dans des zones plutôt privilégiées. Je me suis donc épanoui dans mes différents postes, même si j’ai connu des déceptions par rapport à des problématiques non résolues par l'Education nationale. Aujourd'hui, à mon sens, nous avons trop de charges en dehors de notre mission première, qui est d'enseigner et de transmettre des savoirs. Durant la crise sanitaire, j'ai connu une première période de grande anxiété juste avant le confinement car il a fallu assurer une continuité pédagogique sans pouvoir prendre les précautions sanitaires nécessaires. Ensuite, durant le confinement lui-même, cela s'est bien passé avec mes élèves car j'ai pu faire cours par visioconférence, avec les avantages et les inconvénients que cela représente."
Sébastien Graff, 38 ans, agent de propreté, Montreuil
"Je suis très fier d'être agent de propreté"
"Au départ, je voulais exercer un métier dans la restauration mais j'ai finalement suivi, dès l'âge de 17 ans, les traces de mon père qui était fonctionnaire territorial. Cela fait 21 ans que je suis employé par la ville de Montreuil, en Seine Saint-Denis, où je suis né. Je suis très fier d'être agent de propreté. J'aime le contact avec les gens et la variété de mes missions. La mise en place du plan de continuité de service durant le confinement a été assez difficile, car nous étions nettement moins nombreux qu'en temps normal. J'ai travaillé une semaine sur deux et j'avoue que j'ai eu peur de contaminer mes proches en étant sur le terrain. Mais la direction des services a tout fait pour nous faciliter la tâche et des collègues ont même fabriqué des masques pour nous. La population, elle, s'est aperçue de notre travail quotidien et nous a félicités. Cela fait vraiment plaisir."
Peter Gurruchaga, 39 ans, sapeur-pompier, Garges-lès-Gonesse
"Le courage, le dévouement et l'altruisme sont les valeurs des sapeurs-pompiers professionnels"
"Le courage, le dévouement et l'altruisme font partie des valeurs des sapeurs-pompiers professionnels. Je ne me suis pas posé la question de savoir si je devais être là ou pas durant la crise sanitaire. J'étais au cœur de l'action, bien qu'inquiet dans le même temps pour ma santé et celle de ma famille. Je suis sapeur-pompier volontaire depuis 1999 et professionnel depuis 2003. C'est la première fois que je connais autant de contraintes physiques et psychologiques, notamment lors du pic de la pandémie. Les pompiers sont habitués à la gestion de crise, mais là, avec le nombre important de décès lié au coronavirus, il a fallu gérer en plus la dimension émotionnelle, en particulier chez nos jeunes collègues. Les applaudissements des citoyens à notre égard durant cette période est sympathique. J'aimerais maintenant que les pouvoirs publics nous donnent plus de moyens humains pour assurer nos missions sur tout le territoire."